En 1976, j’avais six ans et demi. Les vacances se passaient en famille (parents, frère, tante, oncle cousine et cousin). Mes parents avaient loué, avec ma tante, une villa à Fréjus, au bord de la mer. Les vacances se partageaient entre plage, visite de monuments et villes voisines de Fréjus.

Un après-midi, ils ont décidé d’aller visiter les arènes de Fréjus. Ces grandes arènes, à mes yeux, ne représentaient rien de plus qu’un édifice, bâti il y a très très longtemps et dont il ne restait que des pierres. Aussi mon oncle a-t-il eu l’idée de prendre des places pour aller voir une corrida, programmée quelques jours plus tard dans ces mêmes arènes. Je me réjouissais de pouvoir voir « jouer » et évoluer un taureau, moi qui aimais tant les animaux.

Le jour de la corrida arriva et je me vois encore m’installer aux côtés de mon frère, dans les gradins de l’arène. Celles-ci étaient noires de monde et tout le monde avait l’air content. C’est alors que des hommes, habillés d’une façon bizarre, sont arrivés avec leur grande « cape » et tout le monde a applaudi. La corrida pouvait commencer. Le taureau fit alors son apparition sous les acclamations du public. Quel bonheur pour moi de voir ce bel animal évoluer sous mes yeux !

Le public scandait des « olé ! », des hourras et j’en faisait de même, heureuse de voir le taureau « jouer ». Cependant, les hommes multicolores avaient une drôle de façon de jouer avec le taureau, ils lui plantaient des pics dans le dos et je me demandais pourquoi ils lui faisaient autant de mal… Le sang coulait sur le dos reluisant de cette pauvre bête. Je me rappelle ne pas avoir compris… À la fin, toujours sous les applaudissements de cette foule réjouie, cet homme, au milieu de l’arène planta une épée dans le cou de l’animal, celui-ci agonisant et se couchant sur le flanc. C’est alors que j’ai compris que ce n’était pas un jeu, mais une barbarie sans nom. Pourquoi avait-on tué cet être qui n’avait fait de mal à personne, qui voulait juste jouer ?

Je n’arrêtais pas de pleurer, de tristesse, d’incompréhension. Ils avaient tué cet animal innocent. La corrida s’est terminée par l’offrande des oreilles (moment très pénible) et par la sortie de cette victime, tirée par deux chevaux. Je n’ai pas cessé de pleurer, tout au long du retour et jusque tard dans la nuit, ma maman ne pouvant me consoler (elle qui n’avait pas assisté à cette ignominie).

Je peux dire que ce jour là, un peu de mon innocence d’enfant est morte avec ce pauvre taureau.

J’ai maintenant quarante-trois ans et, en tapant ces lignes, je ne peux retenir mes larmes, qui sont les mêmes qu’en 1976 : cette corrida m’a traumatisée et marquée à vie.

Il faut continuer à se battre pour que cette barbarie d’un autre âge s’arrête au plus vite !

F. V., Belgique
11/06/2012

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