À Nancy, Frédéric Mitterrand continue à surfer « en catimini »
Le rendez-vous, après repérages, avait été donné aux pieds de la statue de l’architecte Emmanuel Héré, qui avait bâti de si beaux espaces au dix-huitième siècle, qui nous donnaient une très belle vision sur le chapiteau voué provisoirement à la littérature…
Dès le dépôt et l’installation des sacs et autres banderoles « en toute innocence », des petits hommes sombres sortirent en douceur des quatre coins pour nous demander nos identités et nos intentions. Tout s’est fait très poliment de part et d’autre et les « conspirateurs » se sont postés à de bonnes « loges »…
À midi pile, le ministre de la Culture apparut entouré de tout ce que la localité recélait de notables — préfet à casquette, maire et son adjoint à la Culture, présidente du Livre sur la place, collaboratrices et collaborateurs de cette « cérémonie » de rentrée littéraire et service d’ordre bien fourni. Instantanément, le mégaphone anticorrida se mit à émettre : « Monsieur Mitterrand, nous sommes les anticorrida de Lorraine, nous voulons vous parler ! Vous avez inscrit au patrimoine de la France la corrida, ceci est une erreur grossière, de plus vous l’avez fait en catimini… Monsieur Mitterrand, la torture n’est pas la culture ! », repris en chœur par une bonne vingtaine de manifestants. Le mégaphone a bien tenu dix minutes avant d’être confisqué par plusieurs policiers en civil.
Pas découragés, les anticorrida ont généreusement donné de la voix : « Hou, hou, monsieur Mitterrand, nous voulons vous parler, recevez-nous », « La souffrance n’est pas un spectacle », etc.
Des émissaires furent alors dépêchés auprès des « égosilleurs ». Dans un premier temps, le directeur de cabinet du maire, puis la directrice du cabinet du préfet, puis le directeur de la création artistique du ministère… Ce dernier voulait entamer le dialogue pour faire savoir que les manifestants « n’étaient pas laissés de côté, qu’ils avaient été entendus (Ndlr : seuls les déficients auditifs ne pouvaient être informés !), mais que le ministre avait un emploi du temps chargé et qu’il ne pourrait nous recevoir ». Et, sur ce, d’entreprendre de calmer les « troupes ». « Vous savez, l’art de toréer … » Le malheureux, il avait perdu une bonne occasion de se taire. Ses propos étaient d’une telle indigence que l’on se pose vraiment la question de la formation des grands commis de l’État… Mais, enfin, il avait réussi sa mission : faire taire tandis que le ministre s’éclipsait. Échanges de sourds donc. Reste cependant bien d’autres façons pour se faire mieux entendre. Les anticorrida, dont la délégation du CRAC Europe pour la protection de l’enfance en Lorraine, à l’origine de cette action, entendent bien utiliser tous les moyens à leur disposition !
La corrida disparaîtra lorsque l’alinéa 7 de l’article 521.1 du Code pénal sera supprimé, et ce, dans un avenir qui n’est peut-être pas si lointain, tout comme elle sera désinscrite de la liste du patrimoine culturel immatériel de la France, selon nos justes et persévérantes revendications. On y croit « avec force et détermination »… comme aiment à dire les politiques !
Émile Coué, Nancéen bon teint, ne nous désavouerait pas.
Michèle Clément
Déléguée Région Lorraine
http://www.estrepublicain.fr/meurthe-et-moselle/2011/09/17/le-crac-sort-les-crocs